Partie IV - LES RITES AUTOUR DE LA MORT

3 - Chez les personnes originaires d'Afrique Noire




3.1- La vieillesse

En Afrique, l'avancée en âge d'un homme ou d'une femme n'est pas synonyme de régression, au contraire. Ayant acquis expérience et maturité au cours du cycle de la vie, les anciens peuvent alors accéder aux plus grandes fonctions au sein de la communauté et sont respectés de cette dernière. C'est "une évolution dans l'échelle de la division sociale du travail " (12).

" Les vieux ou "jeunes vieux " sont des responsables confirmés, ils enseignent et supervisent les grands travaux.

Le très grand âge correspond à l'âge où les très grands vieux, les vieillards sont plus que des enseignants, ils sont les intermédiaires entre les morts (les ancêtres) et les vivants. Ils ont un rôle qui relève du Sacré ".
   Les vieillards sont "des Etres exceptionnels qui forment les liens entre les Vivants et les Morts ".

" Vieillesse rime avec spiritualité, expérience, sagesse. Les personnes âgées sont considérées comme dépositaires, voire garantes de ces valeurs (au sens philosophique du terme). Dès lors, elles sont censées assurer la pérennité d'un ordre social donné. C'est pourquoi d'un point de vue économique les personnes âgées sont considérées comme des producteurs de biens immatériels : conseils, connaissances, pharmacologie, médecine traditionnelle, règlement de différends, rôles de médiation entre les vivants et les morts... " (12)


3.2- La fin de vie

Les Africains disent que le mourant sait qu'il va partir environ trois mois avant. Il commence alors à léguer ses derniers enseignements, à transmettre ses derniers savoirs à ses successeurs, à ses descendants.
   C'est une période pendant laquelle se font des choses fondamentales pour la vie de la communauté, de la famille, pour son avenir : la "tête blanche" qui va partir, parle avec les membres de sa famille les plus proches, transmet à son successeur "les derniers enseignements, les dernières instructions, les derniers secrets", ainsi que "des consignes, ce qu'il convient de faire ou de ne jamais faire... , l'organisation de la communauté après sa mort, etc... " (12).
   "Tout est dit, reçu, pardonné, transmis aux proches".


3.3- Le sens donné à la mort, sa signification

Dans la culture traditionnelle africaine, la mort jalonne les différentes étapes de la vie. Chaque initiation est en effet une mort (on quitte l'étape précédente) suivie d'une naissance (on entre dans une nouvelle étape).

Pour l'animiste, la mort est triste mais n'est pas une fin en soi ; elle est un commencement, un voyage vers le monde des Ancêtres, d'où le mort continuera de veiller sur ses descendants et de les protéger : "la personne a accompli sa mission ici-bas ; elle rejoint donc le monde des Ancêtres d'où elle est venue".
   "Chaque fois que quelqu'un meure, cette personne renaît dans le monde des Ancêtres. Et toute naissance ici-bas est une mort dans le monde des Ancêtres" (12).


3.4- L'attitude de l'entourage

Il est très important que la famille, les proches du mourant soient présents, disponibles, pour recevoir les derniers enseignements du mourant. Ces transmissions de savoirs se font parfois oralement, mais plus souvent sans parole, par codes, interprétés dans les silences, les regards, les respirations...

En effet, celui qui part devient supérieur et son entourage lui manifeste son respect par son silence. Les messages sont alors reçus par le corps, par l'être tout entier, et déchiffrés à l'aide d'enseignements traditionnels.
    "Moments tragiques pendant lesquels la parole cède la place aux codes. On écoute dans le silence, on écoute avec son corps, avec tout son être, tout se dit sans discours. Ces codes qui font l'objet d'enseignements traditionnels servent de moyen de communication entre celui qui part et ceux qui restent. La parole n'étant à ce moment-là que bruit qui nuit aux messages des codes... et peut dévoiler l'immaturité des successeurs" (12).

Les proches doivent lui assurer qu'il peut partir en paix, le rassurer de la bonne continuité des œuvres entreprises qui ne seront pas gâchées.
   Il est important que le mourant ne soit pas révolté au moment de son départ. Il entreprend un voyage vers l'au-delà ; pour y être bien accueilli, il faut qu'il parte avec un bon souvenir du monde visible. Ainsi, il pourra continuer à aider les siens ; il sera un ancêtre favorable.

La famille reste auprès du mort, afin que soient dits les récits, faits les sacrifices.


21 mars 1999 - (c) isabelle GUYOT
Réalisé par Jérôme MALANDRINO (c) 1999